CHAMPS

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Entre 2005 et 2015 environ j’ai fait de nombreux enregistrements dans le lit d’une rivière dans le sud de la France.

En utilisant des micros de contact que je fixais aux branches des arbres, ou simplement en les jetant dans les buissons, en les enfouissant dans le sable j’ai obtenu une grande variété de matériaux sonores dont je me servais comme de « pistes fantômes », ainsi nommées parce qu’elles modifient le matériel sonore sans qu’on les entende jamais elles-mêmes. Plusieurs pièces ont été ainsi réalisées : Maille (2003-2010 environ), Fragments d’onde (2013), Ramifications (2017), voir pages Travaux en cours).

En 2018 et 2019 j’ai retravaillé avec ces enregistrements sans arriver à quelque forme que ce soit. Pourtant, en les écoutant, j’ai découvert des choses que je n’avais pas entendues auparavant et que je ne pouvais pas définir précisément. J’ai repris ce travail en août 2022. J’ai continué à travailler avec ces matériaux et cela m’a conduit au dispositif actuel, lequel n’est certainement pas définitif. L’assemblage des éléments évolue d’une performance à l’autre, de nouvelles parties sont ajoutées ou retranchées au gré des découvertes et des expériences. La forme dépend aussi du lieu de la performance. Le dispositif n’est jamais remonté exactement de la même façon, la place des composants à l’intérieur d’une chaîne peut varier d’une performance à l’autre. 

Il est facile de voir un tel dispositif comme une sorte de métier sur lequel plusieurs circuits sont entremêlés. L’ourdir peut-être alors au cœur du procès. Cependant si l’on compare le dispositif à un métier, il s’agit d’un métier primitif, il n’y a pas d’ouvrage terminé, on peut toujours ajouter, rapiécer, jouxter, enchaîner, élaguer, mixer, remettre en chantier. Il n’y a pas de distinction claire entre performance et expérimentation. Même s’ils sont infiniment moins compliqués que les systèmes que l’on trouve dans la nature, ce genre de dispositif permet de réactiver des liens qui s’étaient figés et à stimuler des relations plus subtiles entre les différentes formes de vie qui nous entourent. Il ne reste rien de la musique une fois la performance terminée. Les motifs compliqués d’ondes amoncelées s’évanouissent. Il n’y a pas de « produit ». 

Champs – Performance à la Galerie du Bout du monde le 3 juin 2023 – Photo © André Avril

Between about 2005 and 2015 I made numerous recordings in a riverbed in the south of France.

Using contact microphones that I attached to tree branches, or simply tossing them into bushes, burying them in the sand I obtained a wide variety of sound materials that I used as « phantom tracks », so named because they modify the sound material without ever being heard themselves. Several pieces were produced in this way: Maille (2003-2010 approx.), Fragments d’onde (2013), Ramifications (2017), see Works in progress pages).

In 2018 and 2019 I worked with these recordings again without arriving at any form. Yet listening to them, I discovered things I hadn’t heard before and couldn’t define precisely. I resumed this work in August 2022. I continued to work with these materials and this led me to the current arrangement, which is certainly not definitive. The assembly of elements evolves from one performance to the next, with new parts added or subtracted as discoveries and experiences dictate. The form also depends on the location of the performance. The device is never reassembled in exactly the same way, and the position of components within a chain can vary from one performance to the next. 

It’s easy to see such a device as a kind of loom on which several circuits are interwoven. Warping may then be at the heart of the process. However, if we compare the device to a craft, it’s a primitive craft: there’s no such thing as a finished work, you can always add to it, patch it up, join it together, prune it, mix it, put it back together again. There’s no clear distinction between performance and experimentation. Even if they are infinitely less complicated than the systems found in nature, this kind of device reactivates links that have become frozen, and stimulates more subtle relationships between the different forms of life that surround us. There’s nothing left of the music once the performance is over. The intricate patterns of accumulated waves fade away. There is no « product ».

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